"RENÉ
GUÉNON II"
Éditorial
Il
y a sept ans, lorsque nous avons publié le premier volume de ce numéro
monographique consacré à notre guide intellectuel, René Guénon,
voici ce que nous disions, ce qui est aussi en soi une excuse pour débuter
cette note par un écrit antérieur, puisque nous voulons dire à présent
exactement la même chose que ce qu'exprimait notre Editorial d'alors:
« Les
kabbalistes ont dit (parmi leurs nombreuses manières de
travailler) qu'un écrit
peut être lu non seulement d'après l'organisation
normale des lettres, mais aussi dans les espaces laissés
entre les mots, qui constitueraient également un code;
c'est un peu la même chose pour l'œuvre de René Guénon
ainsi que ses paradoxes, car même si le message central
est clair et simple, ses dérivés sont multiples
suivant la position polaire où se place l'auteur, ainsi
que ses propres contradictions ou apparentes contradictions,
qui elles aussi forment
un discours que chaque lecteur interprétera selon ses
limites, son point de vue et à sa manière, comme
une voie d'accès à ce
qui était la raison de vivre de l'ésotériste
français: c'est-à-dire la Connaissance, aussi bien
cosmogonique qu'ontologique ou métaphysique; ces ‘portes’ sont également
mentionnées dans la Kabbale et constituent des points
de conjonction où l'on peut se relier à d'autres
espaces de la conscience individuelle ainsi qu'à l'Universel,
dans la mesure où ces
opérations puissent être définies comme des
rites, c'est-à-dire comme des invocations fondamentalement
adressées,
dans ce cas, au dieu Hermès, fils, messager, et époux
de la déesse Sophia.
« La
raison en est que notre point de vue est celui de la Tradition
Hermétique,
et par conséquent celui de la Cosmogonie, l'Alchimie et
le symbolisme constructif auquel sont consacrés
les travaux de la Franc-Maçonnerie.
« Guénon écrit
pour l'Occident, pour un public d’Occidentaux, c'est-à-dire
pour son milieu natal et rendre ainsi possible la réalisation
(intellectuelle-spirituelle) de ce milieu; l'on pourrait sinon
se demander pour qui écrit-il. Il écrit en recourant
aux doctrines et aux symboles d'autres traditions afin de démontrer
l'Unanimité Traditionnelle; il donne d'ailleurs constamment
des indications et des règles pour que les hommes de ce
siècle,
en particulier les Européens et les Américains,
puissent commencer à reconstruire leur culture propre,
reflet et projection de plusieurs courants de pensée,
Gnosticisme, Christianisme, Kabbale, Tradition Hermétique
et autres dérivés
de la Tradition Polaire, donc Unanime puisque de là toutes
les formes acquièrent un Unique sens. L'on a reproché à Guénon
de ne pas s'occuper plus amplement de la pensée classique
(grecque et romaine), voire du néoplatonisme ainsi que
d'autres éléments
de la culture indo-européenne. Les allusions à ces
doctrines sont cependant nombreuses dans son œuvre, qui
n'est en aucune façon encyclopédique ou systématique,
mais offre au contraire subtilement les éléments
et les règles qui permettent d'affirmer la Culture Occidentale
et les courants qui la constituent en tant que véhicules
de la Connaissance et voies de réalisation spirituelle,
laissant aux soins du lecteur –ou de l'apprenti– la
tâche
de reconstruire et d'expérimenter, comme s'il s'agissait
d'un puzzle, sans laisser de vide, la Philosophie Pérenne,
ce qui équivaut à la
rendre effective, c'est-à-dire à la sortie du labyrinthe
et l'accès au centre, image de l'Axe.
« En
raison des circonstances propres de temps et d'espace durant lesquelles
notre
groupe connut la pensée de Guénon, et des caractéristiques
de notre formation, notre lecture de son œuvre est en général
différente de celle de nombreux soi-disant ‘guénoniens’,
en particulier de ceux qui se prétendent catholiques,
comme des adhérents à n'importe quelle religion.
Pour ce motif, nous devons souligner certains traits et circonstances,
sans
doute mineurs, qui ont marqué notre façon d'envisager
la Voie Symbolique comme une manière de nous rapprocher
de la Connaissance. Et ce n'est pas seulement parce que la plupart
de
nos collaborateurs, ayant absorbé presque intégralement
la Symbolique de la Tradition Hermétique –que la
lecture de Guénon illumina totalement, nous attrapant
dans la magie de son discours– connaissent aussi bien les
tendances néfastes
de ‘l'occultisme’ (en définitive un matérialisation
du spirituel) que la différence entre Métaphysique
et Religion, une confusion –ou imposture– qu'ils
ont également
vécue pour s'être livrés dans leur jeunesse à l'orthodoxie
catholique, au sein de laquelle ils ont été éduqués.
« Voilà plus
de quinze ans qu'un groupe d'amis travaille sur l'œuvre
et les idées de Guénon, bien que certains de ses
membres connaissent sa pensée depuis plus longtemps. Ce
groupe ne s'est cependant pas formé autour de Guénon
sinon, comme nous l'avons dit, autour de la Tradition Hermétique
et de la Symbolique, et ce n'est qu'à l'apparition de
SYMBOLOS,
c'est-à-dire en voulant étendre leur travail intérieur à un
groupe plus ample, que Guénon fut reconnu comme leur guide
intellectuel, car son œuvre tout entière est un continuel
chant à l'Unité, à la Transcendance; une
constante invocation depuis l'Immanence.
« Il
existe plusieurs raisons à cela: la première est
que cela correspondait à la
nature des choses vu l'importance, et surtout l'influence, de
sa pensée sur eux, bien qu'il faille préciser que
ce n'est pas seulement l'œuvre du grand métaphysicien
français
qui a influencé ou appuyé leur processus de Connaissance,
sinon que celui-ci a été soutenu par un grand nombre
d'auteurs, de méthodes et de pratiques propres à l'ésotérisme
en général, y compris des grandes traditions religieuses
ou chamaniques, étudiées bien au-delà d'une
simple lecture littérale ou érudite. Ce qui a également
permis de situer et d'évaluer à sa juste valeur
la place de l'immense synthèse guénonienne au sein
du panorama de la Cosmogonie, Sophia, ou Gnose pérenne,
dont Guénon a été en occident l'émissaire
le plus complet et le plus révélateur au cours
de ce siècle. En second lieu, il faut aussi souligner
que cette décision a été adoptée
afin d'offrir à nos
lecteurs un point de vue toujours plus ample et stable dans le
cadre didactique de notre revue, et en même temps diffuser
l'œuvre
d'un métaphysicien de cette envergure. Il y a eu d'autre
part le besoin de remettre les choses en place et de mettre en
avant un
auteur qui a eu des adeptes de deuxième, voire troisième
catégorie, qui sont malheureusement parvenus à dénaturer
sa pensée au point de la trahir; et cela sans considérer
ses ennemis qui peuvent se compter dans n'importe quelle conjoncture
du monde moderne, bien que par ailleurs nous ne niions pas toute
critique valable qui puisse être faite à son œuvre
ou à sa pensée, pour des motifs nombreux et variés.
« D'un
autre côté,
le besoin a été ressenti d'établir une connexion
entre notre petite publication et d'autres développant
des thèmes et des concepts analogues. Tout comme sur le
chemin qu'implique la Connaissance chacun doit effectuer son
travail par
lui-même, et nul ne peut le faire pour un autre, ainsi
chacun le fait avec ses propres images, qui correspondent à celles
de son conditionnement familial, social, économique et
aux siennes propres, au caractère de chaque personnalité ou
individualité, qui marquent la trajectoire de chaque cheminement.
Cependant cette fragmentation en des points de vue distincts
entraîne
d'innombrables frictions, voire des conflits véritablement
explosifs entre divers groupes, ainsi qu'entre plusieurs personnes
ou individus. De fait, si l'on étudie la pensée ésotérique,
ou plutôt la Science Sacrée, aux lumières
de l'Histoire, l'on pourra observer que son message, exprimé dans
ses symboles, rituels, mythes et doctrine, et manifesté par
la révélation, s'est toujours transmis de cette
manière,
les différents peuples ou communautés ayant constamment
lutté les uns contre les autres pour les formes prises
par leur Tradition. C'est là rien de moins que l'une des
origines de toutes les guerres, en particulier des guerres religieuses,
tribales
ou groupales. Et le plus curieux est que le fond, ou l'essence,
est la même, ce que nous appelons aujourd'hui la Cosmogonie,
l'Ontologie et la Métaphysique, c'est-à-dire l'Origine
de leur Culture révélée de façon
identique, de modes se référant tous à l'Etre
Universel voire même, au plus haut degré, au Non-Être
et à la
Non-Dualité.
« Cela
est dû à ce que l'histoire répète à sa
mesure la grande bataille cosmique, perpétuellement actuelle,
qui marque l'Univers, c'est-à-dire la lutte permanente
entre les opposés qui, curieusement, se complètent
pour produire le miracle de l'Équilibre Universel.
« D'après
ce qui est dit plus haut, il est plus facile de comprendre les
antagonismes qui se produisirent du vivant de Guénon –et
qu'il provoqua lui-même pour une grande part– et ceux
qui suivirent après sa mort, et beaucoup d'entre nous sommes
aussi stupéfiés
par les tentatives de transformer ce guerrier plutôt révolutionnaire
en une entité d'orthodoxie officielle comme par son utilisation
par des groupes néo-occultistes, qu'il a combattu toute
sa vie; plus précisément dans les sphères
de langue castillane, en Espagne et en Argentine.
« En
effet, les luttes entre divers groupes ésotériques
ou même
celles de quelques individualités ou différences
de religion, ou de critères, n'est autre, comme nous l'avons
déjà souligné, que la dynamique des déséquilibres
cosmiques, la bataille astrale, qui peut donc obtenir la conjonction
des contraires et ainsi recréer l'Univers et ses lois
en les conservant perpétuellement actuelles, c'est-à-dire
présentes dans la possibilité d'être revivifiées
par le biais du sacrifice et par l'intermédiation lucide
du symbole, expression de l'analogie et de ses correspondances.
« Nous
avons précisé à plusieurs occasions ce que
nous pensions de ‘l'infaillibilité’ de Guénon
et de ‘l'infaillibilité’ en général,
la considérant comme une forme de la littéralité,
et même impossible dans le discours (faillible-infaillible),
un circuit fermé qui ne dépasse pas la dualité.
« Nous
croyons que c'est ce qui a conduit certains à se convertir
en êtres de stricte obédience guénonienne,
bien plus ‘orthodoxes’ que Guénon lui-même –bien
que ce soit lui qui ait introduit le terme dans son œuvre–,
atteignant une sorte de ‘guénolâtrie’ inquisitoriale,
aussi vide que stérile.
« Soulignons
enfin le langage de Guénon, c'est-à-dire son articulation
et sa rénovation du discours linéaire au moyen
de la restitution de leur origine étymologique à de
nombreux termes, de la sélection de mots dénotant
des concepts affaiblis par l'usage et qui se recréent,
s'illuminent, ainsi que le style poétique de tout ce travail,
particulièrement
manifeste dans l'utilisation de la mathématique et de
la géométrie,
y compris dans la précision du langage quotidien et du
bon sens.
« Il
y a un Guénon secret, toujours actuel, qui dit des choses
inattendues et susceptibles de lectures diverses se référant à la
Tradition Unanime et beaucoup de ses ramifications, en particulier
des messages à l'Occident, et qui n'ont pas été suffisamment
explorés, tâche qui revient à une nouvelle
génération ésotérique
dont l'intérêt est de connaître les Origines
de la Science Sacrée. »
Et dans le numéro 11-12 de l'année 1996, nous continuions notre discours en
précisant:
« La
Tradition Hermétique, c'est-à-dire l'ésotérisme
occidental, est demeurée vivante depuis ses origines égyptiennes
et grecques, et forme part de la colonne vertébrale de
notre culture.
« La
longue liste d'initiés, depuis les textes en témoignant
dans les hiéroglyphes égyptiens et les écrits
grecs, y compris Orphée, Pythagore et Platon, sont les
maîtres
de cette Tradition directement rattachée à la divinité Thot-Hermès
et à sa projection philosophique en Alexandrie au IIIe
siècle,
et hermético-alchimiste au Moyen Âge et à la
Renaissance, et perdurant jusqu'à nos jours. La Tradition
Hermétique est, avec les autres valeurs culturelles qui
constituent la pensée occidentale y compris les religions
coexistant avec elle, la voie initiatique par excellence de tous
ceux qui sont nés
et vivent en Occident et possèdent les structures de son
empreinte culturelle. La Tradition Hermétique, dont la
caractéristique
est la versatilité en regard de la rigueur et du légalisme
d'autres traditions dogmatiques, est la possibilité d'incarner
les Petits Mystères, soit la réintégration
de l'Homme Véritable et de ses possibilités supra
humaines, tel qu'il fut à l'origine, dans un Paradis antérieur à la
chute.
« Nous
livrons ce volume au lecteur, conscients du don que signifie pouvoir
offrir
en quelque sorte une image de ce trésor légué par
nos ancêtres, qui pourrait être incarné, ou
vécu
dans quelque mesure que ce soit, par ceux qui y seraient appelés.
« Nous
dédicaçons cette publication aux ‘solitaires’, à ces
personnes qui, pour différentes raisons, ont reçu
le Message et ont pu percevoir la Voix du Noûs en
eux-mêmes
et par eux-mêmes, c'est-à-dire aux Adeptes de la
Tradition Hermétique. C'est ainsi, en effet, que se propage
cette Tradition et il faut souligner l'importance du livre véhiculé –l'écriture
et l'iconographie– en tant que facteur déterminant
de transmission.
« Il
est évident
que le processus alchimique ne se produit que dans l'intimité de
la conscience, où le sujet de la transmutation voit sa
matière
altérée et adopte la séquence chromatique
correspondant aux images qu'il possède et aux symboliques
par lesquelles il transite. La doctrine est bien entendu son
guide et nombreux sont
les chemins –les méthodes– à suivre,
les arts libéraux témoignent de la majeure partie
d'entre eux.
« Néanmoins,
l'on a actuellement de l'Initiation des idées aussi fausses
que variées. Certains imaginent un peu puérilement
une suite de cérémonies magiques qui octroieraient
de la même façon une personnalité superlative,
d'autres l'assimilent à un certificat ou un diplôme
qui régulariserait leur situation face à leur milieu
et les justifieraient à leurs propres yeux, la plupart
ont pressenti le pouvoir et c'est là tout ce qui les intéresse,
enfin quelques-uns veulent suivre un chemin sûr où ils
puissent opter officiellement pour la voie bureaucratique du
dieu religieux qu'ils espèrent trouver après la
mort; en définitive, tous la conçoivent comme extérieure à eux-mêmes,
comme s'il s'agissait de modifications obtenues par des objectifs
en réaction à divers stimuli, et de fait l'on ne
pense jamais que tout ceci est interne et que l'être humain
est le sujet de l'accession qui débouche sur la Connaissance
et lui octroie l'authentique Etre.
« Cette
possibilité est ouverte en permanence aux Adeptes de la
Tradition Hermétique qui travaillent à leur régénération
par rapport aux coordonnées spatio-temporelles, c'est-à-dire
avec l'incarnation psychique et intellectuelle des symboles de
la cosmogonie, des Idées qui constituent l'Archétype
ou le Modèle Universel, ce qui revient à une véritable
spiritualité.
« Ces
apprentis ‘solitaires’ et
leurs initiations se trouvent généralement en marge
des religions ou des organisations traditionnelles lorsqu'elles
ont cessé d'exister, ou que pour différentes raisons
elles ne peuvent assouvir les besoins intellectuels-spirituels
de qui y
a recours. C'est là le cas présent, où des
organisations pseudo spiritualistes ont pris la place des authentiques
Traditions
et où ces mêmes Traditions et les Religions se trouvent être
corrompues et en voie de désintégration accélérée à cause
de facteurs liés à une fin de cycle. »
Et en 1997,
dans notre numéro 13-14, nous
déclarions ce que nous
voulons également répéter à présent:
« Nous
consacrons ce double numéro de SYMBOLOS à l'étude
de la Franc-Maçonnerie, société initiatique
occidentale, et par conséquent au symbolisme constructif
en tant qu'image de l'architecture de l'Univers ainsi qu'à l'homme
en tant que sa réplique en miniature. La Science Sacrée
est fondée sur la Connaissance de la Cosmogonie qui fait
de tout maître maçon un mage, au sens de son intégration
avec les normes, les nombres et les mesures, employés
en accord avec les cycles et les rythmes propres aux lois naturelles
qui constituent
le modèle, ou archétype, du monde. C'est-à-dire
le théurge en tant qu'homme de Connaissance, et surtout
en tant que créateur et exécutant d'un projet surgi
du néant, analogue au cosmos, mais produit de la concentration
et du travail d'un petit démiurge humain.
« C'est
en ce sens que la Maçonnerie est Universelle et ses ateliers
sont autant de temples de l'Église Secrète. Là s'exprime
la Volonté Pérenne du Constructeur, appelé Grand
Architecte de l'Univers, au moyen du Symbole et du Rite, et l'on
y apprend à connaître l'Œuvre du Créateur,
et par-dessus tout la Pensée qui l'a organisée.
« Donc être
franc-maçon n'est pas simplement l'appartenance à une
institution quelconque pour ésotérique qu'elle
soit, sinon la prise en charge, l'incarnation de son corps doctrinaire
manifesté dans la totalité des mondes physique,
animique et spirituel. Il faut pour cela un travail qui agisse
de manière
opérante sur les postulants et les conduise à appréhender
non seulement la majesté des concepts abordés,
mais aussi la féroce dignité de ce labeur d'accession à la
Connaissance, principe et moteur de tout travail, y compris matériel
et profane; cette dignification du travail va de pair
avec toute notion d'Ordre propre à la Construction, et
se trouve présente dans la Maçonnerie (un Ordre)
depuis l'époque
des corporations médiévales jusqu'à nos
jours.
« En
réalité,
la tâche du maçon est de polir la pierre brute et
l'amener à la
perfection. En cela son travail ne diffère pas de celui
de l'alchimiste –ou hermétiste– qui mène à bien
la transmutation, c'est-à-dire qu'il complète un
cycle concret et réel dans un monde perpétuellement
inachevé,
quasi illusoire. Il est important de préciser que ce polissage
de la pierre, commandé par le Grand Architecte de l'Univers
aux frères maçons, ne s'éteindra qu'à la
fin des temps, c'est-à-dire le moment où le temps,
vivant, toujours présent, absorbera la totalité de
l'espace.
« En
cette fin de cycle, la Maçonnerie se présente comme
le dépositaire
d'une doctrine vivante et traditionnelle qui offre même
la possibilité d'une réalisation intellectuelle
(spirituelle), c'est-à-dire de l'Initiation à la
Connaissance.
« De
là cette
renaissance de l'Ordre à laquelle nous assistons, surtout
si l'on tient compte que la Franc-Maçonnerie (noachite)
a reçu son héritage doctrinal et expérimental
d'un cycle antérieur à celui du déluge biblique,
selon la Tradition. »
Ce qui était
de nouveau affirmé dans le numéro 15-16:
« Aujourd'hui,
l'apparition de signaux dont le phénomène de El
Niño
est un si bon exemple (inondations, désertisation et incendies),
ajouté aux tremblements de terre, pestes, maladies, guerres,
famines et diverses manifestations jusqu'alors inconnues, et à des
conflits sociaux ou familiaux, et toute sorte d'anomalies au
sein de la vie culturelle des peuples, nous est devenue habituelle
et
l'on peut en voir partout: il suffit de prendre un journal quelconque
ou d'allumer la télévision. Ces catastrophes naturelles
et leurs séquelles économiques et politiques ne
sont cependant rien comparées à la perversion de
l'homme actuel qui a tué tout symbole et tout espace sacré au
point d'en être devenu un robot vide de sens survivant
dans un monde sans signification. Les crimes écologiques,
le réchauffement
global, la folie cybernétique et le clonage en font foi.
Surtout cette dernière aberration, si terrifiante qu'elle
en fait trembler, représente la plus horrible grimace
de l'humour noir, puisqu'elle met en jeu des gens qui croient
descendre du singe,
se clonant eux-mêmes, indéfiniment.
« Mais
il ne s'agit pas de donner une vision ‘pessimiste’ de
ce grand événement, et encore moins catastrophiste, –bien
que néanmoins pas assez hypocrite pour dissimuler des
faits que la science des rythmes et des cycles annonce par ailleurs
depuis
des siècles–, pour en donner une version ‘optimiste’,
c'est-à-dire de se cacher la tête comme l'autruche
alors que dans le même temps que cet événement,
analogue à la
mort d'un être vivant, concrètement l'être
humain, une porte s'ouvre sur d'autres états de l'Être,
et supprime sa douleur, son angoisse, sa maladie, sa pauvreté et
toutes les autres misères inhérentes à l'état
de l'humanité actuelle, en cette fin de cycle que nous
vivons.
« Les
guerres religieuses, les querelles entres différentes entités ésotériques,
et pas seulement entre institutions occultistes sinon entre divers
groupes également traditionnels, sont aussi des symboles
de la dissolution totale, aussi importants que celui de l'accélération
et la solidification générale, bien qu'ils constituent
en même temps la possibilité de résurrection,
d'une nouvelle naissance dans un Âge d'Or, où les
hommes d'aujourd'hui puissent vivre leur régénération
spirituelle et psychique et forment les fondations de cet extraordinaire Éon
qui approche.
« De
toutes ces circonstances ainsi que de la possibilité d'une
issue salvatrice naît le mythe universel de l'Arche de Noé,
où l'on peut conserver les espèces pour une terre
régénérée
après le déluge, ce qui s'effectue, de notre point
de vue, par le biais des moyens offerts par la Tradition Hermétique
et la Voie Symbolique, en particulier le Symbolisme Constructif.
« La
cyclologie a la vertu de nous faire comprendre que ce que nous
vivons et
la fin de cycle qui nous attend n'arrive pas pour la première
fois mais est arrivé d'autres fois avec une intensité différente
et qu'il ne s'agit pas d'une terreur apocalyptique accompagnée
d'horreurs physiques comme on le peint généralement,
mais des ultimes râles agitant un malade, ainsi qu'il arrive
parfois aux derniers instants d'un être humain –dont
le décès est pour lui la fin de son monde, c'est-à-dire
la fin d'un monde, et également l'opportunité de
la vraie vie.
« De
là que
l'étude de la cyclologie et la méditation postérieure,
ainsi que la réflexion sur les authentiques prophéties
de tous les peuples sont aussi une base et une méthode
pour sortir de la prison de l'esprit et connaître d'autres états
de l'Être Universel, tel que le symbolisent l'échelle
de Jacob et, nous l'avons dit, l'Arche de Noé, qui n'est
autre que le véhicule par lequel nous pouvons nous transporter
d'un monde à l'autre, sans aucune concession au littéral.
Cette étude nous conduit à méditer sur la
Grandeur et la Majesté de qui a créé et
conçu
le Cosmos et les Éons, et par ce biais à communier, à ne
faire qu'un avec Lui: si l'on ne fait qu'un avec le concert cosmique,
l'on ne fait qu'un avec Celui qui l'a créé, et
Lui ne fait qu'un avec soi. Le temps devient simultané et
la réalité de
tout cela surpasse toute conception profane. Pour cela les théories
scientifiques modernes ne sont qu'un jeu d'enfant comparées à la
conception traditionnelle de la Cosmogonie, où dans la
dimension d'un dieu un siècle est une seconde.
« Mais
en réalité ce sont les extrémistes religieux,
les faux prophètes et la corruption et la dénaturation
des signes qui caractérisent non seulement le monde profane,
mais aussi l'espace ésotérique, ces mafias refusant
toute possibilité d'une véritable initiation et
représentant
la structure des signaux les plus graves et les plus caractéristiques
de cette fin de cycle.
« L'accélération
quasiment totale nous fait penser à un moment terminal
que nous sommes déjà en train de vivre et le paradoxe
est que l'homme, reniant ce qu'il a, pleure et se lamente sur
ce qu'il
n'a jamais eu et que donc il ne peut perdre.
« Au
sein de l'horreur généralisée, il ne reste
alors que la possibilité de la réalisation particulière,
qui recherche dans une loge ou un petit groupe l'appui et la
doctrine pour étayer l'appel de la Connaissance, loin
des escroqueries et des manœuvres politiques et immorales
auxquelles nous ont habitués certains mouvements qui,
travestis sous divers aspects innocents tentent de nous faire
prendre des vessies pour des lanternes,
la religion et le fondamentalisme pour la Métaphysique
et la Science Sacrée; cela devient tout particulièrement
flagrant chez ceux qui, tout en se prétendant traditionnels,
ne font qu'essayer d'apporter à leur moulin toute l'eau
du mécontentement que suscite le monde moderne, et ce à des
fins équivoques.
« Il
reste toujours la possibilité, que les mêmes conditions
cycliques d'aujourd'hui ne rendent pas improbable, de la grâce
de l'autoréalisation,
puisque Dieu est au Centre de tout être humain sans qu'il
soit besoin d'une religion (bien qu'il se révèle
souvent par son intermédiaire), sans l'obligation du dogme,
des cérémonies,
de la bureaucratie administrative et de la ‘légalité’.
« L'on
peut en tout cas affirmer sans crainte de se tromper que notre
situation
et, en général, l'objectif de notre vie change
si nous acceptons comme définitif le fait que nous en
soyons à une étape
avancée du Kali Yuga, que par conséquent
la chute est d'ores et déjà inévitable et
que toute action de type social devient inutile par le simple
fait que nous
ne pouvons rien faire de plus que d'opérer sur l'individu
ou dans un petit –très petit– groupe. Accepter
ce fait –qui nous a été enseigné– est
bien entendu très douloureux, en ceci que cette humanité se
condamne elle-même et qu'il n'en restera rien. C'est cependant
un soulagement de reconnaître que cela forme part du plan
divin, et que nous n'en sommes aucunement responsables.
« Et à présent
que la ‘post-modernité’ a donné lieu à la
‘pré-apocalypse’,
il semble adéquat de citer la phrase bien connue de René Guénon,
qui termine son livre Le Règne de la Quantité et
les Signes des Temps: "si l'on veut aller jusqu'à
la réalité de l'ordre le plus profond, on peut
dire en toute rigueur que la ‘fin d'un monde’ n'est
jamais et ne peut jamais être
autre chose que la fin d'une illusion." »
L'année
suivante, notre lettre disait:
« En fait,
nous souhaitons réitérer les termes de l'éditorial
de notre volume précédent publié sur le même
sujet, auquel nous renvoyons ceux qui s'y intéressent.
« Mais
il est intéressant d'observer que l'un des ‘mythes’ modernes les plus importants diffusé par le cinéma, la télévision
et même par l'Internet dans le monde entier est celui de l'enfoncement
du Titanic, car il est clair qu'il représente le naufrage
du navire, l'engloutissement du bateau du monde moderne avalé par
les eaux de la confusion et du chaos. Et, entre désespoir
et violence, d'innombrables rats apparaissent et se propagent, parmi
lesquels les plus agressifs et corrompus, les rats de Fin de Cycle,
sont ceux qui conservent encore certains vestiges traditionnels,
quelques noms et rites dégradés, certains symboles
renversés, excréments qui représentent leur
ration spirituelle, leur ‘religion’, et qu'ils confondent
avec le sacré. Un autre ‘mythe’ analogue, également
propagé par les média et qui constitue pratiquement
une réalité pour de nombreux enfants et de gens mentalement
peu dotés, est celui des dinosaures, dont la disparition à un
certain moment est considérée comme inhérente à une époque
cyclique déterminée, au cours de laquelle une catastrophe
naturelle provoqua leur extinction. Il faut ajouter à cette
dernière perception celle des objets volants non identifiés
qui pourraient déclencher des calamités sur la Terre.
En ce qui concerne des formes bien concrètes du chaos –à chaque
coin de rue–, quant à la dissolution de structures socio-économiques,
le Secrétaire des Nations Unies lui-même avait prévenu
le public en général contre l'impact de ‘l'effet
2000’ (Y2K) sur les ordinateurs. Il est également curieux
qu'une autre expression en vogue de nos jours, le recyclage de papiers,
verres, boîtes de conserve et bien d'autres éléments
de consommation quotidienne, soit aussi largement diffusée,
puisque cette notion est en rapport direct avec un plus ample recyclage
dont le macrocosme est le protagoniste, à la fin de ce cycle éminent.
« Pour
en terminer avec ces signaux qui apparaissent de toutes parts
autour de nous –comme le passage de comètes inévitables
et ponctuelles–, nous voulons clore cette lettre avec une citation
de René Guénon qui fera sans aucun doute réfléchir
nos lecteurs:
« Nous
ne sommes certes pas de ceux qui sont disposés à nier
‘l'intervention du démon dans les choses
de ce monde’, bien au contraire; mais qu'on la cherche
là où elle
est réellement;
il est vrai que ce serait un peu plus difficile
et plus dangereux que de suivre tout simplement les fausses pistes
sur lesquelles le dit démon ou certains de ses représentantont
estimé avantageux de lancer les ‘chercheurs’ plus
ou moins naïfs, pour empêcher
précisément qu'ils ne risquent de découvrir
la vérité… » Études
sur la Franc-Maçonnerie et le Compagnonnage, Tome
I, octobre 1936.
Sur la lancée
et continuant d'indiquer une voie, d'esquisser un profil et surtout
un point de vue, ce qui a distingué notre revue, nous disions:
« Dans
les numéros Fin de Ciclo I et II,
nous avons longuement fait le compte-rendu de divers signes qui
caractérisent
l'époque actuelle, tels que maladies, fléaux, malformations,
sécheresses et inondations, constants tremblements de terre,
changements climatiques, extinction biologique, etc. etc., et malgré notre
optimisme de base, nous ne pouvons pas ne pas voir ce qui nous entoure.
Ce qui dénote une monstrueuse multiplication ainsi qu'une
constante accélération de l'oubli des valeurs les plus élémentaires,
ce qui débouche sur le dénigrement de la vie humaine,
c'est-à-dire de l'espèce et donc également de
l'environnement et des autres espèces. Il faut y ajouter l'injustice
dans tous les domaines, la fraude et la délinquance, le sectarisme,
et surtout la trahison, selon qu'il est décrit dans l'Évangile
chrétien. De même, l'apparente normalité de la
notion de robotique, jointe au clonage, tous deux hors de proportions
et porteurs de conséquences si inimaginables que, si ce n'était
précisément pour la fin du temps et le pieux rayon
qui en terminera une bonne fois avec ce monde, ils pourraient constituer
une innommable monstruosité dont nous nous repentirions; un
cauchemar qui se déroule déjà et qui ne peut être étranger à la
compassion des dieux. Toute cette confusion est exécutée
par des gens qui sont les acteurs de rôles propres au monde
moderne, à sa philosophie (?), sa science et sa technique,
rôles assumés au préalable, caractéristiques
d'une civilisation décadente qui touche à sa fin, puisque,
ainsi que nous l'avons dit, le post-modernisme a laissé place à la
pré-apocalypse, immédiatement suivie de l'apocalypse
elle-même, que nous sommes déjà pratiquement
en train de vivre, car quelques décades de plus ou moins
ne sont rien dans la vie humaine.
« Bien
que nous soyons chrétiens, il nous faut dire que ce que nous
soulignons est particulièrement notoire dans la religion actuelle
(c'est-à-dire l'expression officielle des traditions abrahamiques),
qui est encore sous ses formes les plus hautes, sans mentionner l'ignorance
et la cruauté des intégrismes et fanatismes contemporains,
soit le rationalisme théologique ou l'expérience mystique émotionnelle,
est la version d'un dieu personnel, qui n'atteint que rarement le
niveau du Noûs-Démiurge, et se trouve donc assujettie à la
psyché; chez quelques fidèles peut-être atteint-elle
l'ontologie et l'unicité de l'Être Universel, mais jamais
la Métaphysique (à moins qu'elle ne soit confondue
avec ce que l'on désigne ainsi dans l'actualité) ou
l'Identité Suprême, ou Non Dualité, véritable
essence de toute initiation. Ceci produit l'inversion des valeurs
et place la Métaphysique au service de la Religion, ou de
l'Ontologie (dans le meilleur des cas), qui part du principe que
ce que perçoivent les sens est réel, et par conséquent
l'on constate la notion d'une foi matérielle, ce qui constitue
un véritable matérialisme spirituel. Ainsi, la Maçonnerie
devrait être liée à un exotérisme religieux
hors duquel ne pourrait avoir lieu aucune initiation, et voire même
soumise à cet exotérisme, comme si la verticale dépendait
de l'horizontale, inversant ainsi tout processus génératif,
ce qui est le plus flagrant signal de la contre-tradition.
« Nous
avions déjà formulé, dans nos numéros
précédents, notre refus total de cette confusion entre
Religion et Science Sacrée et nous ne souhaitons pas en rajouter à ce
sujet. Quant à l'ésotérisme proprement dit et à son
représentant le plus fidèle de ce siècle, René Guénon
(quoique certes pas le seul), il faut signaler la malversation de
son œuvre aux mains de soi-disant disciples et acolytes, véritables
maîtres de la confusion, comme c'est le cas de Frithjof Schuon
et de Jean Reyor, à qui est venu s'ajouter depuis quelques
années le "théologien" Jean Borella, exemples
parfaits de ce à quoi nous faisons référence,
qui sont d'autant plus dangereux et contre-traditionnels qu'ils se
trouvent proches des authentiques valeurs de la Tradition Unanime,
toujours verticale et non pas de simples énoncés
‘traditionalistes’.
« Il ne
faut pas pour autant que nous perdions l'Espoir et la Foi authentique
en un monde futur, neuf et virginal, paré de la fraîcheur
d'une nouvelle aurore, auquel nous devons parvenir au moyen du sacrifice
qui précède toute gestation, et même de la souffrance
qui caractérise toute re-génération, et où la
douleur, la pauvreté, la maladie, l'ignorance et la mort ont été une
fois pour toutes abolies par la miséricorde divine dans le
même temps que l'accession au Paradis d'un Âge d'Or,
pour nous et nos semblables. »
Et nous achevions
le numéro 21-22 (2001) par ces
mots:
« Merci à tous
ceux qui ont rendu possible l'espace, le milieu, de SYMBOLOS,
et tout notre respect à ceux qui croient encore, par les temps
qui courent, à la possibilité de la Connaissance et à sa
réalisation, en dépit des milliers de gestes et de
postures adoptés par l'Adversaire qui loge lui aussi en notre
intérieur et qui n'est pas seulement un ennemi circonstanciel,
puisque c'est à cause de lui et à son rôle que
la lumière s'est éteinte sur la scène universelle,
vieillissant le monde, frustrant toute perspective par la mort
lente de la valeur du symbole parmi les plus crues et les plus
abjectes
simulations, les impostures ‘traditionalistes’ les plus
grotesques au sein de l'ignorance, la cruauté et l'injustice, œuvres
de l'orgueil et le fanatisme de ceux qui jouent le rôle pathétique
que leur a fixé le Destin, avant que ne tombe le rideau sur
l'Œuvre. »
Aujourd'hui,
alors que cinquante ans se sont écoulés depuis la mort
de Guénon, nous voulons lui rendre cet hommage dont les sujets
principaux sont bien entendu, ainsi que nous l'avons signalé,
l'œuvre de Guénon, en ceci qu'elle se réfère
tout spécialement à la Tradition Hermétique, à l'Arithmosophie,
au Symbolisme constructif, à l'Alchimie et à l'Ésotérisme
occidental en général, outre la présentation
de l'intéressante correspondance entre Guénon et A.
K. Coomaraswamy, et le métaphysicien français et Louis
Cattiaux.
Nous ouvrons
ce numéro avec les travaux des plus récents collaborateurs
de SYMBOLOS: "René Guénon
et la Tradition Hermétique", de Mireia Valls, et "Guénon,
Dante et la Tradition Hermétique", de Patricia Serdà,
qui devaient initialement être précédés
d'une étude sur le Centre, de Fernando Trejos, qui a dû être
suspendu pour cas de force majeure, bien qu'il sera prochainement
publié dans le SYMBOLOS
télématique. Ensuite, "Vide cor Tuum" de
Josep Mª Gràcia, qui reprend tout naturellement le sujet d'un
autre point de vue; "Brève sur le Symbolisme Constructif",
d'Iñigo Correa qui remet en question le thème de l'Hermétisme
et de la Construction; cette première partie s'achevant avec
les articles spécifiquement maçonniques "René Guénon,
Maître Maçon" de Mª Angeles Díaz, et "La
Maçonnerie dans l'œuvre de René Guénon",
de Francisco Ariza, et enfin "Erreurs et Manipulations autour
de l'œuvre de René Guénon", de Marc García,
qui termine cette première section.
Aussi bien ces
notes que les articles de la première section parlent par
eux-mêmes et nous recommandons à nos lecteurs de les étudier
attentivement.
L'on poursuit
immédiatement avec des "Gloses", retenues pour leur
opportunité en
tant que travaux hermétiques réalisés par un
groupe et qui n'avaient pas pu être publiées dans notre
premier hommage à Guénon –SYMBOLOS 9-10,
1995: "René Guénon" (I)– en raison
de l'excès de matériel, comme nous l'avions mentionné.
Nous nous référons à celles qui furent effectuées
sur ses œuvres L'Ésotérisme de Dante, Symboles
Fondamentaux de la Science Sacrée, Les États Multiples
de l'Être et La Crise du Monde Moderne, par Antonio
Casanovas (†)1 ; La
Grande Triade par Josep Maria Gràcia, L'Homme et
son Devenir selon le Vêdânta et Introduction
Général à l'Étude
des Doctrines Hindoues par Antonio Guri, Appréciations
sur l'Initiation par Marc García, Les Principes du
Calcul Infinitésimal par Miguel Angel Aguirre, et finalement
un ouvrage cher à nos lecteurs américains: "Les
Traditions Précolombiennes dans l'Œuvre de René Guénon",
de Mª Victoria Espín. Il faut ajouter à ces noms celui
de Lucrecia Herrera, impliquée non seulement à de multiples
reprises dans ce numéro consacré à Guénon,
sinon également dans le reste des publications de SYMBOLOS.
Il ne nous a
pas été possible d'inclure la seconde partie de l'étude
d'Antonello Balestrieri "D'un Document Confidentiel Inédit (et
des ‘ratiocinations’ de son auteur)" (aujourd'hui
en version électronique)
en raison de l'ampleur prise par ce second volume monographique consacré à Guénon
(712 pages), tout comme d'autres notes et commentaires de livres
et revues, que nous publierons lors de notre prochaine réactualisation
télématique.
Guénon
a bien entendu représenté une constante dans nos publications,
puisque l'importance de son rôle a toujours été évidente,
non seulement dans la mesure où nous l'avons souvent mis en
exergue en tant que notre guide intellectuel mais aussi en raison
de l'importance historique de son œuvre; car nous le considérons –et
nous ne sommes pas les seuls– comme un personnage providentiel,
vu qu'il est clairement pour l'Occident le plus important émissaire
de la Vérité manifestée par la Tradition Unanime;
c'est en tout cas le personnage le plus controversé et important
de l'ésotérisme du siècle précédent,
pour qui voudrait bien le voir, selon des critères historiques,
de cette manière.
Rappelons que,
outre lui avoir consacré un double
numéro de SYMBOLOS
de 440 pages en 1995, nous avons maintenu en permanence dans notre
revue une section intitulée "René Guénon" dans
laquelle ont été publiés de ses travaux inédits
dans ses livres ("Les Dualités Cosmiques", "Quelques
Pages Oubliées de René Guénon", "Discours
contre les Discours"), de faible divulgation ou non traduits
en castillan ("Notes sur la Production des Nombres", "Observations
au Sujet de la Notation Mathématique", "L'Initiation
et les Métiers", "Silence et Solitude", "Le
Démiurge", "Les Arts et leur Conception Traditionnelle",
etc.), ainsi que sa correspondance avec d'autres auteurs, entre autres
celle qu'il avait entretenu avec le roumain V.
Lovinescu, publiée pour la première fois, en quelque
langue que ce soit.
L'on sait que
le métaphysicien français désigne la Franc-Maçonnerie
comme Institution dépositaire de la Tradition, et comme la
seule apte à décerner une initiation valide à l'époque
actuelle en occident; il désigne également la Tradition
Hermétique comme capable de transmettre de facto une initiation
aux Petits Mystères et l'on doit souligner que le Frère
Guénon attribue aux Petits Mystères rien de moins que
la réintégration dans l'état Primordial et Originel,
et à sa doctrine la connaissance totale de l'Univers, c'est-à-dire
sa cosmogonie qui rassemble la terre et le ciel, dont s'occupent
l'Alchimie et l'Astronomie-Astrologie: la maîtrise des science
des rythmes et des cycles, ce qui n'est pas peu de chose, pour peu
que l'on se mette à méditer là-dessus.
Au contraire,
il n'octroie aucun type de validité ésotérique à la
Théologie, ni aux sacrements catholiques, et il souligne que
le Christianisme rejette toute notion se rattachant à l'initiation
et à l'ésotérisme, comme on le sait bien. Et
il précise qu'en cette matière la religion en soi ne
surpasse absolument pas les exposés profanes:
« ...
la distinction de l'ordre profane (comprenant ici non seulement
ce
qui est dépourvu du caractère traditionnel, mais aussi
tout exotérisme) et de l'ordre initiatique est, à vrai
dire, la seule qui dépasse les contingences inhérentes
aux états particuliers de l'être et qui ait, par conséquent,
une valeur profonde et permanente au point de vue universel. » (Aperçus
sur l'Initiation, p. 178: "De la Mort Initiatique").
Ce que le catholicisme
intégral et la droite ont falsifié de l'œuvre
de Guénon pour leurs intérêts particuliers, est
utilisé aujourd'hui de la même façon par l'islamisme
fondamentaliste qui tire profit de son œuvre en la tergiversant,
et tout spécialement du fait que, dans sa vie privée,
il ait choisi l'Islam pour religion et l’Égypte pour
domicile comme n'importe quel citoyen, pour propager une version
dénaturée de sa pensée, associée aujourd'hui,
en dépit d'un immense paradoxe, à la gauche la plus
radicale, qui apparie le mahométanisme avec les classes sociales
les plus dépourvues et leur lutte contre le capitalisme, quand
ce n'est pas, sous un autre aspect, l'exaltation quasiment religieuse
de la pauvreté par la pauvreté, ce qui est vu comme
le summum de la spiritualité et la certification
de la vertu.
Ceci est d’autant
plus vrai dans le cas de l’Islam qui, selon Guénon lui-même,
est sûrement la Tradition où l’ésotérisme
se trouve le plus éloigné de l’exotérisme
:
« De
toutes les doctrines traditionnelles, la doctrine islamique
est peut-être celle où est marquée le plus nettement
la distinction de deux parties complémentaires l’une
de l’autre, que l’on peut désigner comme l’exotérisme
et l’ésotérisme. » (« L’Ésotérisme
Islamique », Cahiers du Sud, 1947).
Il est intéressant
de souligner que le métaphysicien français écrivit
cette étude après avoir vécu de nombreuses années
en Égypte et avoir adopté le culte de cette religion
depuis 1930, c’est-à-dire qu’il s’y était
personnellement intégré.
D’après
les analystes qui suivent de près ce problème, il est
difficile aujourd’hui de faire la distinction entre l’Islam
et le fanatisme religieux, du moins en Occident, ce qui provoque
une profonde douleur chez l’authentique fidèle ou chez
ceux qui auraient jadis sympathisé avec cette Tradition, humiliés
par cette association Islam-terrorisme (encore que ce dernier ne
soit « qu'intellectuel » comme sur Internet où de
nombreuses pages et forums peuvent être consultés à ce
sujet), argument fallacieux qui ne peut qu'être le produit
de ce fanatisme. Les mêmes analystes soulignent également
que ce rôle, au bout du compte répresseur, avait été personnalisé à l’époque
de la Contre-Réforme –et pas seulement à cette époque– par
l’Église Catholique au sein des Religions officielles
d’Occident qui ont formé le monde moderne actuel. Ces éléments
dissociateurs seraient actuellement constitués par deux camps
: l’islamique religieux et le judéo-chrétien, également
appelé par les mahométans les « infidèles » (dénomination
sans appel qu’ils étendent au reste du monde non islamique,
c’est-à-dire comprenant les Hindous et les Extrême-orientaux),
ou encore les « croisés », leurs ennemis mortels
contemporains. Cela revient à dire que tous ces camps ou secteurs
développent en fait une fonction au sein de la dissolution
générale dont ils sont partie prenante, au point de
l’incarner en devenant de violents agents du jeu du Destin
exprimé par la destruction à la fin d’un Grand
Cycle et qui a besoin d’exécuteurs pour la partie du
plan devant être réalisée par l’être
humain.2 Malgré que
ces fanatiques se considèrent comme des saints, bien que dans
cette divine comédie ils ne jouent en réalité que
le rôle de bourreaux, aussi coupables que leurs opposants du
génocide et du massacre collectif que véhicule tout
fanatisme implicite dans l’extermination qu’impliquent
les guerres religieuses.3
Actuellement
plusieurs de ces groupes islamiques – qui emploient le terrorisme
intellectuel– agissent de la même façon que les
sectes, qui ne sont en somme rien d’autre que des déviations
ou des dégradations religieuses, dont ils ont copié le modus
operandi. Ils utilisent Guénon, falsifiant son message
et méconnaissant son œuvre, ne la citent textuellement
qu’à grand peine, peut-être par ignorance, ou
parce qu’au bout du compte elle ne leur convient pas, puisque
la version intéressée, partiale et résumée
qu’ils en ont leur suffit. Ils promettent l’initiation
et la métaphysique pour un futur sous l’hégémonie
islamique et confondent délibérément la sharyah avec
le taçawwuf (ésotérisme initiatique)
en prétendant que l’Islam est une tradition totalement
unie se conduisant de façon unanime et dont ils sont les représentants
officiels, directement rattachés à la chaîne
traditionnelle qui naît rien de moins que de Mahomet et Ali,
ce qu’ils laissent percevoir comme en passant, solennellement
et avec une prétendue autorité, représentation
théâtrale qu’ils ont jouée des centaines
de fois, jusqu’à atteindre la perfection. C’est
ainsi que nombreux sont les abusés qui croient qu’ils
seront marginalisés ou jugés par une superstructure,
voire même historique, qui les condamne. Stigmate dont ils
peuvent s’affranchir s’ils se reprennent et adhèrent à cette
religion et ses promesses, cessant d’aller de leur côté.
Mais ils ne remarquent pas que la Religion –ainsi que l’a
dit Guénon à de nombreuses reprises– est un domaine
différent de la Métaphysique dont la voie est l’Initiation
qui est refusée, méconnue ou dissimulée, quand
ce n’est pas persécutée, par les Religions du
Livre. Et ainsi l’ingénu se voit pris dans un système
pour lequel les Petits Mystères sont méconnus –et
les Grands Mystères encore davantage– et demeurent assujettis à un
domaine strictement religieux, moral et dévotionnel, persuadé de
détenir la vérité et de faire de grands progrès
spirituels en combattant de toutes les façons pour cette cause
qui est « sa cause », ce qui le rendra méritant
face à la « superstructure », ce qui n’a
rien à voir avec l’authentique Science Sacrée
et la Connaissance et le conduira en peu de temps au fanatisme.
Cependant, aussi
bien certains « chrétiens » que des « islamiques » ou
même la minorité juive, prétendent au moyen de
leurs habiles manigances nous faire croire que la sagesse passe par
la religion.
Et ils le font
d’une manière si désagréable qu’il
se rendent en fait détestables, à tel point que beaucoup
préfèrent les pseudo vérités et les « déviances » de
l’occultisme new age, qui appartiennent au bout du
compte à l’orbite de la pseudo initiation, voire au
pire à l’anti-tradition, au lieu de la lutte sordide
pour métamorphoser la métaphysique en religion –et
encore en donnant un incroyable avantage à la seconde sur
la première, la choisissant même comme voie initiatique– et
de confondre par intérêt leurs différents aspects,
tel que privilégier l’exotérisme aux dépens
de l’ésotérisme, la sainteté par-dessus
la sagesse et le fanatisme destructeur et moniste face à l’équilibre
(qui est offert par la conjonction permanente des opposés),
ce qui les rend clairement contre traditionnels et surtout contre
initiatiques, corrupteurs du message traditionnel et membres actifs
de la dissolution universelle par le biais de la falsification de
ses valeurs et de sa nature (dans ce cas, l’utilisation déviée
de Guénon et de ce qu’il signifie), en empêchant
ainsi beaucoup d’accéder à la véritable
initiation à laquelle ils étaient cependant disposés.4
Il va de soi
que cet hommage provient de l’hermétisme maçonnique,
né officiellement au XVIIIe siècle, tout comme il y
eut durant les siècles précédents un hermétisme
alchimique qui se transforma par la suite en rose-croix, et toujours,
depuis les premiers siècles du christianisme et le Moyen Age
jusqu’à aujourd’hui, quoique fort occulte et censuré,
un hermétisme chrétien qui n’a besoin de rien
d’autre que des symboles évangéliques et de la
révélation du cœur au sein du silence, ce qui
exclue la paralyse et représente l’antidote aux terreurs
secrètes de perdre toutes les références qui
constituent notre être et l’exclusion de tout ce à quoi
nous nous identifions.
Pour terminer,
nous voulons rappeler ce que Guénon dit en se référant
aux rites en général, dans Aperçus sur l’Initiation,
car :
« … toute
action accomplie selon des règles traditionnelles, de
quelque domaine qu'elle relève, est réellement
une action rituelle… » (Page 143, « À propos
de ‘magie cérémonielle’ »),
complétant
ses dires dans les pages 199 et 200 (« Initiation effective
et initiation virtuelle ») :
« … les
symboles sont essentiellement un moyen d’enseignement,
et non pas seulement d’enseignement extérieur, mais
aussi de quelque chose de plus, en tant qu’ils doivent
servir surtout de ‘supports’ à la méditation,
qui est au moins le commencement d’un travail intérieur
; mais ces mêmes symboles, en tant qu’éléments
des rites et en raison de leur caractère ‘non-humain’,
sont aussi des ‘supports’ de l’influence spirituelle
elle-même. D’ailleurs, si l’on
réfléchit que le travail intérieur serait
inefficace sans l’action
ou, si l’on préfère, sans la collaboration
de cette influence spirituelle, on pourrait comprendre
par là que la méditation sur les symboles prenne
elle-même,
dans certaines conditions, le caractère d’un véritable
rite, et d’un rite qui, cette fois, ne confère plus
seulement l’initiation virtuelle, mais permet
d’atteindre un degré plus ou moins avancé d’initiation
effective. »
Et dans une
autre de ses études, il affirme en particulier, au sujet des
rites hermétiques en tant que manifestation de la Science
Sacrée :
« On
pourrait dire que les symboles contenus dans les écrits
alchimiques constituent ici l’exotérisme, tandis
que leur interprétation
réservée constituait l’ésotérisme…» (Introduction
Générale à l’Étude des Doctrines
Hindoues, 2ème partie,
chapitre IX).
Il n’est
pas inutile de souligner ici les mentions qu’il a également
effectuées tout au long de ses écrits, se référant
aux correspondances entre le symbolisme alchimique et le constructif,
ce dernier propre à la Maçonnerie, qui le met en pratique
dans ses ateliers lors de l’Initiation aux Mystères. Federico
González |